dimanche 12 février 2017

Le tiroir

Quand j'étais enfant...
Bon ok...j'ai peut-être encore un corps d'enfant, et souvent un coeur d'enfant, mais il fut une époque où j'avais aussi l'âge d'un enfant...

Et à cette époque, la concrétisation du phénomène abstrait de la mémoire passait par la visualisation de mon cerveau comme une série de tiroirs que je pouvais ouvrir et fermer comme bon me semblait, par le biais de mon si-spacieux front. Je ne sais pas à quel moment, mais il fut un temps le besoin de mimer l'action d'écrire sur un papier ce que je voulais me rappeler pour le mettre ensuite dans un de mes tiroirs a disparu. C'était une belle idée d'enfant, mais entre vous et moi, le phénomène de la mémoire est beaucoup plus complexe que quelques mots imaginairement écrits sur un papier. On ne choisit pas toujours ce qui entre dans ces tiroirs, pas plus que ce qui ressort. C'est peut-être pour cette raison que je prends autant plaisir à mettre des mots sur mes histoires...une façon de mettre certains moments, dans certains tiroirs.

Vendredi 10 février 2017...
Une journée que je mets dans celui des souvenirs spéciaux...muy muy muy spéciaux!! Le tiroir d'en haut complètement. Celui que peu ont le privilège d'y être rangés. ...

C'est la journée qui clôturait la formation à laquelle j'ai participé.

Cette journée a commencée comme tous les autres matins du mois (sauf les dimanches) :

5h25 : réveil et courte préparation, tel un brossage de dents et un choix de vêtements, assez simple étant donné le peu que j'ai ici!

5h29 : passage de mon hôtel au site de yoga de l'autre côté de la rue pour faire acte de présence durant la demie-heure qui est accordée pour prendre le thé et se décoller les yeux, en silence. Chaque matin était pareil, mais différent. Les élèves arrivaient peu à peu, doucement. Parfois seuls, parfois par deux ou trois, toujours en silence. Seul le bruit de leurs pas sur le gravier annonçait leur arrivée.

Ce matin là, du 10 février 2016, je me suis installée dehors. Bon ok, tout est dehors ici...mais par dehors, je veux dire, en dehors de l'énorme toit de feuilles de palmier qui protège la salle à manger. J'avais envie de voir la (pleine) lune! (Magie #1)

Déjà, je sentais que cette journée allait être spéciale. Normalement les gens s'éparpillent sur le site, ayant besoin de leur propre espace. Ce matin-là était différent. De la façon la plus fluide et naturelle du monde, peu à peu j'ai senti que les élèves se rapprochaient dans l'espace où je me trouvais. C'était palpable ; tous et chacun étaient habités par un sentiment de nostalgie, que nous tentions de réconforter avec la lune, avec une tasse de thé chaud entre les mains, mais aussi, avec la présence de nos collègues (devenus notre famille!) à nos côtés. Le besoin d'espace personnel était présent, oui, mais oh combien réduit ce matin-là! (Magie #2)

5h50 : Clochette.
Gustavo, l'autre assistant, s'occupe comme d'habitude de sonner la clochette pour nous inviter à monter dans la salle de yoga et nous installer sur les tapis, placés la veille par l'équipe d'élèves qui, en échange d'un prix réduit pour la formation, avaient quelques tâches quotidiennes à faire pour le centre.

Surprise! Les tapis sont disposés d'une façon totalement différente qu'à l'habitude. Au lieu d'être placés tout autour de la salle avec une extrémité pour Brigitte et l'autre pour Gustavo et moi, les tapis était tous dans la même direction et ceux en avant étaient réservés pour les profs et assistants. Au centre, une femme était installée avec ses bols de cristal.

6h00 : Méditation
Brigitte nous a guidés au travers de la puissance de la vibration des sons. Difficile d'avoir un plus beau dernier moment de méditation de groupe! (Magie #3)

7h00 : Séance de postures...la dernière.
Tout le reste du mois, je n'ai pas fait les postures, ou presque. J'étais debout, à me promener au travers des élèves, à les ajuster. Ce matin-là, je me suis gâtée, je suis restée sur mon tapis, à partager la pratique avec eux. J'ai pris quelques pauses pour prendre des photos. Ça m'a permis de voir avec un plus grand angle la beauté du moment, sous la lumière du soleil levant. (Magie #3)

8h30 : Vient le moment de fermer la séance. Jamais je n'oublierai cette image, ou plutôt la sensation de ce moment.
À ma gauche : Brigitte. La grande, l'adorable et humble Brigitte. Celle qui m'a remis mon premier diplôme de prof de yoga en 2011.
À sa gauche : Gustavo. Un collègue d'une sensibilité et d'une douceur hors du commun.
À ma droite : Susana. Une des profs avec qui j'ai commencé à faire du yoga, ici sur la costa chica du Mexique.

Et devant moi... : 25 personnes.
25 merveilleuses personnes d'un peu partout sur le globe (Chili, Honduras, Nicaragua, Colombie, France, Swiss, Allemagne, Hollande, Chine, États-Unis, et bien sûr Mexique)

25 humains...
25 beaux humains...avec chacun leur bagage, leur parcours et leurs défis.
25 humains qui se sont engagées dans un processus d'exploration personnelle à travers des enseignements, parfois physiques, parfois philosophiques, parfois même scientifiques.

25 humains...qui, au fil des semaines, se sont fait une place dans mon coeur, à chacun leur manière.

Tous, devant moi, devant nous.
Les mains jointes devant le coeur.
En signe de reconnaissance de nos différences et nos ressemblances.
Les yeux pétillants, pour la plupart larmoyants.
Remplis de gratitude.
Conscients de la richesse et de l'impermanence du moment.
(Magie #4)

S'ensuit plusieurs minutes d'applaudissements. À eux. À nous. À Brigitte surtout.
Des cris, des rires, des larmes.
Des accolades. Plusieurs accolades. Coeur contre coeur, un par un, nous nous sommes remerciés.
(Magie #...ça me me tente plus de compter rendu là, mais vous comprenez le principe!)

Vivre une formation intensive en groupe est une expérience puissante et transformatrice. Je sais ce que c'est, je l'ai vécu. Je ne remercierai jamais assez la Vie de la chance que j'ai eu de le vivre en 2011...et encore moins celle de l'avoir vécu de nouveau, à travers des yeux d'assistante cette fois-ci!

J'ai travaillé fort pour contenir mes émotions. Je sentais qu'en tant qu'assistante, j'avais besoin de rester le plus neutre possible. Évidemment j'étais remplie de joie et de nostalgie, mais ces émotions leurs appartenaient plus à eux qu'à moi ; ce n'était pas "ma" formation. Et somme toute, je suis fière d'avoir réussi à m'en détacher un peu!

Mais Ouf!!...la journée ne faisait que commencer!

Le déjeuner était festif, léger et remplis de complicité.

9h30 : Dernier cours de David McAmmond. Un Canadien (de l'Alberta) de plus de 70 ans, qui était aussi invité dans ma formation il y a 5 ans. Pour ceux qui trouvent que je raconte bien les histoires, je vous jure que je suis une crotte de nez à côté de lui! Un grand sage, possédant un savoir incalculable, mais surtout une personnalité des plus attachantes. Pour mes yogis québécois, je vais faire mon possible pour qu'on puisse le recevoir à Montréal avant qu'il ne puisse plus se déplacer aussi loin. Tout au long de la semaine, il nous a transmis ses connaissances techniques, historiques et philosophiques en lien avec le yoga, par le biais d'histoires tantôt drôles, tantôt mystiques, tantôt scientifiques. Rebelle dans l'âme, enfant dans le coeur, il nous a fait terminé la formation par différentes postures en équipe, parfois à deux, parfois en pyramides de 5 ou 8 personnes. J'ai eu la chance de faire une démo avec lui. Ce n'est pas tous les jours que je peux faire un handstand dans le dos David McAmmond et mettre mes pieds de chaque côté de sa tête pour qu'il se plie en 2 pour me soulever avec son dos et me déposer debout ensuite! Wouhouu!! Bon ok, ici un vidéo serait de mise, mais "no tengo"!

L'horaire de cette journée était un peu différente des autres pour la suite. Après le dîner, nous avions l'après-midi libre pour profiter de la playa (o cualquier cosa) et nous étions convoqués à 19h pour le souper et la fiesta de fermeture.

Les choses ont beaucoup évoluées en 5 ans! Nous avons eu droit à rien de moins qu'un spectacle privé, sur mesure, de la troupe réputée de Mermejita Circus. Heu...wow!! Vous connaissez mon amour pour le cirque...

Ensuite a eu lieu la remise des diplômes. Brigitte avait quelques mots pour chaque élève. Encore une fois de me tenir devant tout ce beau monde heureux et fier d'avoir accompli leu mission était un grand privilège.

Pour reprendre les mots de notre "querida maestra" Brigitte en remettant les diplômes aux élèves : "This world will be a better world, because there is now 25 more yoga teachers".

La suite...et bien c'était la fiesta! Les gens étaient si beaux, si heureux!! On a dansé, beaucoup dansé. J'ai été gâté : mon ami qui dansait la salsa est venu, j'en ai presque abusé (mes orteils me l'ont signalé le lendemain). On a fait du hula hoop, on s'est baigné, on a re-dansé. Mais par dessus tout, on s'est aimé.

C'était une fête parfaite quoi!!
Comme toute bonne chose a une fin, j'ai regagné mon lit aux petites heures...

...et j'ai refermé le tiroir...

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